Sergio PAGNI: “J’ai assez de points pour atteindre les Finales”

A Wroclaw, PAGNI sera en lice pour l’une des quatre dernières places à prendre pour les Finales de Coupe du Monde de Paris. Double vainqueur de la Finale en 2009 et 2010, il est également champion d’Europe en titre et champion du monde de double mixte.
Tout d’abord comment va la vie?La vie est belle, je suis dans une bonne période. En octobre, je vais fêter ma première année de mariage. Du côté du tir à l’arc, rien d’exceptionnel : ce n’est pas une très bonne année même si je me suis beaucoup entraîné et que je tire bien à l’entraînement. Si ce n’est pas une très bonne année du point de vue de mes résultats individuels, ça l’est en ce qui concerne le double mixte. Professionnellement, ça va bien aussi, notre magasin de tir à l’arc marche bien et nous avons beaucoup d’archers comme clients.
La qualification pour les Finales de Coupe du Monde à Paris va se jouer ici à Wroclaw. Comment te sens-tu par rapport à cela?Mes chances sont élevées : j’ai assez de points pour atteindre les Finales. Je me sens bien et mes résultats sont hauts, en qualifications également ; j’ai amélioré d’un point le record d’Italie à Cali et mes sensations techniques sont bonnes. Nous sommes de nombreux archers de talent présents en Pologne et nous savons que sur 15 flèches beaucoup de choses peuvent arriver ; mais j’ai de bonnes sensations et de bonnes impressions quant à mes chances de me qualifier pour Paris : je veux être du voyage (rires)! C’est ma dernière occasion de remporter une troisième Finale de Coupe du Monde sur cinq ans, même si je suis focalisé sur la qualité de tir plutôt que sur le palmarès.
Tu es justement le premier athlète à avoir remporté deux Finales de Coupe du Monde. Comment évalues-tu tes chances cette année en regard de la saison écoulée?Je pense que mes possibilités sont hautes. A Medellin, je me suis incliné devant Roberto HERNANDEZ (ESA) qui a tiré 150 points. Même en étant très en forme il n’y a rien à faire contre un tel score. Je me sens bien, et je peux affirmer objectivement que j’ai 100% de chances, mais de nombreux archers tirent au même niveau. J’ai commencé la saison avec quelques ennuis physiques et je me sens mieux à nouveau, mais je dois admettre que j’ai perdu ce “sens de la victoire”. Par le passé, j’étais sûr de gagner et de me qualifier avec l’or en vue, mais depuis l’année dernière, j’ai un peu perdu cette sensation. En ce moment, je débute mes matches avec moins de confiance dans mon tir, mais je travaille là-dessus et je suis sûr que ça va bien aller ici à Wroclaw. Lors des Finales, le jeu est différent : nous serons les huit meilleurs archers et même si j’ai gagné deux fois, je sais que ce n’est pas facile à réaliser. Tout se joue sur une journée, il faut que ce soit ton jour. Je me souviens qu’en 2007 à Lausanne, j’étais premier à tous les niveaux : classement mondial, classement de la Coupe du Monde, etc. A l’époque, les Finales se jouaient entre seulement quatre archers : j’ai perdu mes deux matches et terminé dernier du classement. En termes de points, j’ai tiré les meilleurs scores mais les matches se sont soldés par des barrages que j’ai perdus. A Edimbourg, je ne me suis qualifié qu’en sixième position et j’ai gagné. Je dirais qu’il s’agit surtout de réussir à se qualifier. L’an dernier, j’ai raté les Finales de Tokyo : j’étais sur le point de me marier, il n’y a eu que trois au lieu de quatre étapes de Coupe du Monde, je n’avais pas très bien débuté et n’ai pas réussi à compenser ça sur les deux étapes de Coupe restantes. Cette saison, je suis plus concentré.
Les archers des Etats-Unis dominent désormais les classements d’arc à poulies. Si l’on compare cette situation avec celle des années précédentes, quand c’est toi qui dominais tout le monde, dirais-tu qu’ils t’ont dépassé?Les choses ont changé. Il y a trois ans, on tirait à 70 mètres ; je suis meilleur à 70 mètres qu’à 50. A 70 mètres, en cas de problème sous l’effet du vent, ça reste possible de compenser une mauvaise flèche. A 50 mètres, même sous le vent, on ne peut pas se permettre la moindre mauvaise flèche. Cela ressemble au tir à l’arc en salle : il faut réaliser un tir propre, on ne peut pas se permettre le moindre 9, parce qu’on sait que ça ne suffira pas pour gagner : on ne peut pas perdre le moindre point. Je suppose que les Etats-Unis ont un plus grand réservoir d’archers performants à 50 mètres, ils ont plus de concurrence lors des qualifications américaines, donc ils arrivent plus compétitifs sur les étapes de Coupe du Monde. Je suis sûr que les changements de règlements ne sont pas dirigés contre moi, mais j’ai gagné ma première Coupe du Monde et les règlements ont changé, et après que j’ai gagné ma deuxième Coupe du Monde, les règlements ont à nouveau changé. Peut-être que World Archery veut m’empêcher de gagner une nouvelle fois (rires)… Je plaisante, mais il est évident que ces changements de règlements entraînent des bouleversements au classement. Les athlètes américains d’arc à poulies ont le meilleur niveau au monde, égal à celui des Européens. Je dis souvent qu’on devrait organiser, juste pour rire, une compétition comme la Ryder Cup de golf où l’Europe affronterait les Etats-Unis. Par ailleurs, on peut voir que Reo WILDE n’a pas très bien entamé la saison, tout comme moi, mais maintenant il tire bien et il mène le classement mondial. Je ne pense pas que le niveau américain soit plus élevé, je pense plutôt que c’est le niveau mondial qui a augmenté et que les Etats-Unis disposent de plus d’archers d’élite qu’avant.
Une chose est sûre : tu es déjà qualifié pour Paris en double mixte avec ta partenaire Marcella TONIOLI. Au vu des résultats de cette année, on peut dire que vous formez la meilleure paire au monde.On peut dire ça (sourire). Marcella et moi nous entendons très bien, nous formons une très bonne équipe et sommes très bons amis. Sur le pas de tir, on a du plaisir à tirer ensemble et on sait qu’on est forts. Je pense que les autres équipes le sentent, elles n’ont pas peur de nous, mais elles nous respectent. Nous sommes deux archers individuels d’élite qui sommes encore meilleurs quand nous tirons ensemble. Nous savons également que la seule équipe qui peut nous tenir tête est celle des Etats-Unis, mais elle n’est pas aussi bien préparée que nous. Ce que je veux dire par là, c’est qu’on se connaît et savons exactement ce que l’autre attend : c’est notre grande force. Les Etats-Unis ont beaucoup de très bons archers, mais la paire qu’ils alignent change souvent. Ils ratent peu de points, mais ne progressent pas comme nous en tant qu’équipe. A Medellin, on a bien tiré et nous avons remporté la victoire. A Antalya, j’ai eu de la peine à trouver le 10, mais Marcella a compensé pour les points que j’ai perdus : parfois c’est l’inverse.
Quelle est la spécificité du double mixte et comment se passe ta transition par rapport aux matches individuels?En ce moment, nous sommes bien meilleurs en double mixte. Personnellement, j’essaie d’appliquer mes bonnes sensations du double mixte aux matches individuels, parce que j’ai beaucoup plus de plaisir à tirer en double mixte. Je n’aborde pas les matches pour atteindre un score précis et gagner – je les aborde sous l’angle du plaisir, parce que j’aime le tir à l’arc et je veux avoir du plaisir à tirer. Lors des derniers événements, j’ai eu peu de plaisir, pas parce que je perdais, mais parce que je tirais pour les points. Le double mixte me donne cette confiance qui me manque individuellement, et j’essaie de me concentrer sur le fait que Marcella est avec moi et que nous tirons ensemble.
En dehors des compétitions, comment se passe ta vie de sportif d’élite?Cette saison est un peu différente des autres. Normalement, au début de la saison et au cours de l’été, je prends une petite pause et cours une demi-heure par jour. Puis, j’effectue ma préparation physique durant trois ou quatre semaines entre les saisons en salle et en plein air : je me concentre surtout sur mon dos et mes épaules. D’habitude, je n’ai pas de problèmes pour tirer avec un arc réglé à 60 livres car ma maman n’a pas mis au monde un petit format (sourire), mais la saison dernière a été très longue et il n’y a pas assez de temps entre deux compétitions pour récupérer. Cette année, j’ai eu un problème à une épaule que j’ai traité par des séances d’osthéopathie. Au cours de ces deux mois, j’ai dû apporter quelques changements à ma technique. Avant cela, à la Coupe du Monde en Salle de Nîmes par exemple, je tirais bien et mes groupes étaient plus rapprochés que maintenant. Malheureusement, je n’ai pas pu me préparer normalement. J’ai fait de la natation pour mon épaule, mais j’avais un peu peur des tournois en Colombie à cause de l’altitude et des problèmes respiratoires qu’elle pouvait engendrer. Au final, tout est bien allé. Je dois avouer que 90% de mon travail est mental, ce que je sais gérer puisque je suis aussi entraîneur : travailler sur de jeunes archers en tant qu’entraîneur m’apporte ce qui me manque dans mon propre entraînement. Après cette période de blessure, j’ai recommencé à m’entraîner, à travailler sur ma technique et à apporter certains changements. Je n’aime pas rester toujours sur la même position et la même technique, simplement parce que ça fait 20 ans que je pratique le tir à l’arc ; tout changement qui peut m’apporter des améliorations est bon à prendre et j’ai la capacité de m’adapter rapidement, ce qui est un avantage.
Est-ce qu’aux Jeux Mondiaux tu t’es senti comme un athlète olympique?Oui, même si ce sont deux événements différents. Ma femme a participé à deux Jeux Olympiques, donc je connais les différences, mais c’était agréable d’être reconnu en tant qu’athlète dans la rue. La cérémonie d’ouverture a été impressionnante, avec un public de 40’000 personnes en délire, une expérience fantastique! Je pense que les grandes différences étaient du côté de l’organisation et de tout ce qu’il y a derrière le sport. Le fait de loger dans des hôtels plutôt que dans un village d’athlètes comme lors des Jeux Olympiques représente également une grande différence. Mon point de comparaison, ce sont les Jeux Universitaires 2005 d’Izmir que j’ai remportés : là-bas, je vivais dans le village avec tous les autres athlètes et dans les mêmes conditions qu’un village olympique. Mais c’était quelque chose d’autre, car on vivait en dehors du centre-ville et coupés de la population locale, sans le sentiment d’être regardés et reconnus en tant qu’athlètes. A Cali, le cadre était le même que celui des Coupes du Monde et des Championnats du Monde.
Quels sont tes objectifs pour les années à venir?Je veux toujours continuer à grandir, depuis toujours. Ma vie est basée sur l’apprentissage de nouvelles choses et j’ai la chance de travailler avec des gens très professionnels. Collaborer avec des gens de talent, qui apprécient mon travail et sur lesquels je peux compter, rend mon travail meilleur. Ma vie à l’heure actuelle est basée sur le fait de travailler avec les bonnes personnes, avec plus de succès. J’aime le tir à l’arc et ce qu’il m’apporte!
Allez à la biographie de Sergio PAGNI et visionnez la vidéo de la finale des Championnats d’Europe 2012 à Amsterdam.
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