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Céline SCHOBINGER (SUI): “Rio 2016 est à ma portée”
Lausanne
Céline SCHOBINGER a battu la quintuple championne du monde en salle Natalia VALEEVA en finale du Tournoi de Nîmes. Nous avons rencontré la jeune Suissesse à la veille des championnats de Suisse de tir à l’arc en salle dont elle est une grande favorite.
Qu’a représenté ta victoire du mois de janvier lors de la deuxième manche de la Coupe du Monde en salle à Nîmes, après une brillante finale contre une grande championne? C’est un premier pas pour les quatre années à venir dans la course à la qualification aux Jeux de Rio, qui m’encourage à continuer. Je constate qu’après trois mois avec un nouvel entraîneur, mes résultats sont en progrès et ils ne pourront être que meilleurs dans quatre ans. Ce succès constitue une réelle motivation et une belle réussite en espérant qu’elle sera la première d’une longue liste. Tu as par contre fait l’impasse sur la dernière manche et la grande finale de Las Vegas. Pourquoi? Parce que je venais de terminer mes examens de biologie à l’Université de Lausanne, et cela faisait deux semaines que je n’avais plus tiré. Aussi, je ne voulais pas me mettre de pression supplémentaire en m’entraînant pour aller à Las Vegas et risquer ainsi de rater mes examens. En quoi consiste un entraînement standard et avec quelle fréquence t’entraînes-tu? J’essaie de m’entraîner un minimum de quatre ou cinq fois par semaine. Bien entendu, tout dépend de ma participation à des compétitions le weekend, des grandes compétitions à venir et du temps à disposition. Cela dépend également des conditions d’entraînement : dans une salle adaptée, je vais tirer un maximum de flèches aux distances qui comptent (18m ou 70m). Si je n’ai pas cette possibilité, je peux également m’entraîner à la maison avec une cible à 2m. Dans ce cas-là, je ne vais pas tirer 500 flèches, mais plutôt me concentrer sur la technique, avec un plus petit nombre de flèches.
Comment décrirais-tu tes conditions d’entraînement dans ton club de Vevey par rapport à tes aspirations? Ce ne sont pas des conditions évidentes parce que je n’ai à disposition que trois soirs par semaines où je peux m’entraîner pendant deux heures, tout en sachant que je ne peux pas y aller seule, puisque j’ai besoin d’aide pour monter les cibles et tout le matériel. Je n’ai donc pas l’option d’y aller quand je veux, à défaut d’autres clubs ouverts 24 heures sur 24. Il est clair que c’est contraignant, mais je m’arrange comme je peux et grâce à la cible que j’ai à disposition à la maison, je peux quand même tirer un peu pour ne pas perdre la main. Aurais-tu la possibilité de changer de club avec de meilleures conditions? Je le pourrais, comme je le fais certaines fois lorsque je me déplace à Sion par exemple, mais le temps que je perds dans les trajets n’en vaut pas la peine. En été par contre, nous avons un terrain en plein air continuellement à disposition et les cibles sont déjà en place, ce qui me permet de m’y rendre seule.
En Suisse, où se situe le potentiel réel des archers pour concurrencer les grandes nations du tir à l’arc?En Suisse il n’y a pas beaucoup d’archers, en comparaison avec la Corée, où une majorité de la population pratique le tir à l’arc, les talents sont immédiatement repérés et entraînés. Ici par contre, il y a quelques entraîneurs de clubs et peu de bons tireurs. Les jeunes avec du potentiel doivent se débrouiller seuls pour espérer obtenir des résultats, tout en sachant qu’il est difficile de les obtenir sans suivi, de par le manque d’entraîneurs ; c’est donc peu motivant. Nous voyons par exemple notre entraîneur national environ chaque deux mois pendant un weekend et nous sommes entre 15 et 20 archers, ce qui complique le travail.
Quel montant dois-tu réunir annuellement pour subvenir à ton budget?
En comptant les entraînements et les compétitions, il me faut réunir environ 20'000 francs suisses par an.
Et quels sont les moyens et les aides dont tu disposes pour obtenir des sponsors?
Il n’y a pas beaucoup de moyens en Suisse. Il est vrai qu’il existe des bourses, mais les démarches prennent tellement de temps que ça ne sert pas à grand-chose à l’arrivée. Malheureusement, pour faire des résultats, il faut de l’argent, et pour obtenir cet argent, il faut avoir obtenu des résultats. Il faut donc tomber sur les bonnes personnes qui vont accepter de t’aider et de te sponsoriser. J’ai eu la chance de rencontrer des personnes à travers lesquelles j’ai réussi à obtenir un sponsor personnel qui m’aide beaucoup, tout en espérant que d’autres suivront. C’est d’ailleurs la démarche de ce sponsor qui m’a fait comprendre que je devais utiliser cette opportunité comme déclencheur afin d’en obtenir d’autres, en profitant de l’intérêt et de l’attrait que je représente.
L’an dernier, tu as terminé à la première place du classement national de ta catégorie. A travers ta hiérarchie et tes performances, est-ce que tu reçois une aide supplémentaire de la part de Swiss Olympic ou d’autres instances sportives suisses?
Pendant quatre ans et ce jusqu’à l’année dernière, j’ai reçu une carte Swiss Olympic qui m’a permis d’obtenir une bourse de l’Etat de Vaud. Cela m’a également apporté certaines aides financières, comme par exemple le remboursement de mes lentilles de contact. Par contre, cette année, je ne l’ai pas encore reçue et je ne sais pas si cela viendra.
Comment arrives-tu à concilier tes études, tes entraînements et ta participation aux divers tournois tout au long d’une saison? Lors des périodes d’examens, si je suis loin pour une compétition, je m’arrange avec l’Université afin de les passer lors des sessions de rattrapage, tant que je respecte les délais pour les effectuer, à savoir janvier, juin et août. Quant aux cours, je vois directement avec les professeurs concernés comment s’arranger. Il est simplement question de planifier en avance.
Quelle grande différence d’adaptation et de résultats rencontres-tu lors d’une participation à une compétition en salle ou en extérieur? Je fais en sorte de faire abstraction d’éléments extérieurs défavorables et de m’habituer aux contraintes, que ce soit le vent ou la pluie. Cependant, le tir doit rester le même. C’est une question de concentration afin de réaliser le meilleur tir possible, sinon aucune différence dans la manière de tirer.
En 2011 tu as pris une année sabbatique pour te concentrer notamment sur les Championnats du Monde, qualificatifs pour les Jeux Olympiques de Londres. Quel bilan dresses-tu de cette année?
C’était pour moi une façon de me mettre dans la peau d’un sportif professionnel, ce qui n’est pas évident parce que tout ce qu’on a, finalement, c’est le tir. J’ai ainsi pu partir en Australie pour m’entraîner dans des structures professionnelles, de loin les meilleures conditions dont j’ai disposé jusqu’à aujourd’hui. En Suisse par contre, il n’y a pas de telles infrastructures et conditions, et les trois ou quatre mois que j’ai passés ici ont été difficiles, puisque je n’avais que ça à faire, mais seule, et il était donc plus difficile de me motiver. Le sport professionnel en Suisse ne vaut pas la peine d’être vécu dans ces conditions, car il suffit de rater une compétition et tout prend une ampleur plus grande. Il y a donc des avantages à le pratiquer comme je le fais, car le tir prend moins d’importance et cela évite de tomber en dépression en cas d’échec.
Penserais-tu à t’expatrier à l’étranger si une opportunité de devenir professionnelle se présentait?
Pour le moment je n’en sais rien. Je pense que j’aimerais faire autre chose et ne pas avoir uniquement le tir à l’arc dans ma vie, avoir un travail normal et d’autres occupations. Je ne me vois pas gagner ma vie avec ça et je ne sais pas si je saisirais une opportunité de devenir professionnelle si elle se présentait. J’ai eu l’occasion de voir les aspects positifs et négatifs du professionnalisme et c’est donc une décision qui demanderait réflexion.
A propos de cette expérience de cinq mois en Australie: tu as suivi les entraînements du champion olympique de l’an 2000, Simon FAIRWEATHER, à l’Institut du sport australien. Est-ce que cette aventure t’a fait grandir comme athlète de haut niveau? Cette expérience m’a beaucoup changée. Simon FAIRWEATHER s’occupait de moi presque tous les jours. Quand j’avais un problème, il était là pour s’occuper de moi. C’est la grande différence et le manque que je ressens en Suisse.
Comment est-ce que tu te situes par rapport à une athlète comme KI Bo Bae, championne olympique en titre? Comme une pauvre petite amateur (rires). En Corée il y a d’autres moyens, mais elle reste une référence chez les femmes et elle n’est pas devenue championne olympique pour rien. Elle a en outre le talent et les infrastructures pour y arriver. J’aimerais pour ma part également y arriver, mais j’aurais pour cela besoin des mêmes conditions, chose impossible en Suisse. La concurrence est tellement forte en Corée qu’il est plus difficile de devenir champion national que champion du monde. Peu de tireurs en Europe pourraient atteindre les résultats des tireurs coréens.
Est-ce que ta non-qualification pour les Jeux de Londres représente une grosse déception ou était-elle prévisible? C’était une grosse déception. Je me suis frayé un chemin pour les qualifications et ça n’a pas fonctionné, pour diverses raisons.
Quels sont tes objectifs à court, moyen et long terme? Pour le moment, je me focalise sur la technique, sur les changements nécessaires pour m’améliorer. Les scores et les résultats ne sont pas un objectif dans l’immédiat, je veux fixer mon tir et suivre les entraînements avec mon entraîneur pour ensuite arriver en 2015 et 2016 à gagner des points. Il est clair que la victoire à Nîmes a été une grande surprise, c’était génial, mais ça ne représentait pas mon objectif principal. Je vais quand même continuer avec ma participation à des compétitions, mais pas de façon aussi soutenue que lors des deux dernières années. Je vais me focaliser sur une Coupe du Monde, sur un Grand Prix et sur les Championnats du Monde, si possible, histoire de garder un pied dans la compétition.
Et Rio 2016, du rêve, ou une réalité atteignable? Je pense que c’est possible. J’ai déjà fait une qualification pour les Jeux et ce n’est pas un problème de le refaire. J’ai vu que c’était possible de le réaliser.
Palmarès en bref Céline SCHOBINGER (SUI) – Née le 18 septembre 1989 1ère Individuel Tournoi Européen en Salle – Nîmes 2013 6e Individuel Tournoi de qualification finale aux Jeux de Londres 2012 - Ogden 2012 8e Individuel Finale de Coupe du Monde en Salle – Las Vegas 2012 2e Individuel Open d'Australie – Adelaide 2010 2e Equipe Championnats d'Europe de la jeunesse – Algarve 2007
World Archery Communication